A la recherche de ses racines: présentation à rebours du festival
2012 est la troisième belle année de son existence. Débuté en 2009 sous sa forme embryonnaire, le festival dispose maintenant d’une pleine semaine de création mais garde sa connexion au liquide maternel : depuis l’année dernière, FestiFaï nous met les pieds dans l’eau avec un concert inaugural flottant – « un vieux fantasme » nous apprend Philippe Séranne au maniement des ficelles de cette édition – et grand succès l’année passée. Outre la Ferme du Faï pouvant accueillir un public important dans un lieu fort intriguant, et le Café du Peuple, scène plus intime, le Festifaï semble avoir une prédilection pour les endroits aqueux permettant la dérive des sentiments et la flottaison des imaginations…Pas terre-à-terre mais plutôt terre-à-eau – une eau qui voyage en tous sens du local au mondial – c’est bien dans ce « terreau fertile » que le festival souhaite s’épanouir !
Le temps fort du festoch’ ? Le spectacle final élaboré au fil de la semaine par ses nombreux acteurs « on stage » en résidence de une à trois semaines: musiciens, chanteurs, comédiens, plasticiens et volontaires internationaux. C’est un spectacle qui se veut « total », non réellement dans un esprit futuro-dadaïste où l’on retrouve en effet le même goût pour le mouvement, ou l’ambition d’une création pour cinq sens (vue, ouïe, odorat, toucher, goût)…Mais plutôt la volonté de créer un spectacle « entier », qui tisserait des liens entre nos cordes sensibles et nos cordes intellectuelles, entre nous et le lieu qui nous environne, entre nous et les autres.
Bon c’est pas tout, mais ce FestiFaï, lui, il vient d’où ?
Pour le savoir, nous avons laissé de côté le site officiel pour suivre le temps à rebours et délivrer les secrets de sa création…
Si l’on en croit son instigateur, un savant fou nommé Philippe Séranne (pianiste et faiseur de bons mots à son actif ), c’est bien dans les laboratoires du festival qu’il faut chercher :
FestiFaï c’est « une alchimie, un catalyseur, un terreau fertile d’idées et d’initiatives individuelles qui se sont conjuguées. »
Et parce que la métaphore culinaire revient souvent en bouche du savant gourmand : « c’est comme une mayonnaise », une émulsion qui fusionne des éléments disparates pour créer de délicieuses trouvailles !
Comme un arbre, ou comme un bon vin donc, FestiFaï s’est affirmé patiemment au travers des essais de son cuisinier-savant facétieux. S’enrichissant de lieux et rencontres, celui-ci est né d’une foultitude de petits évènements qui, de fil en aiguille, ont nourri le projet…
Dans la casserole, y ont donc mitonnés :
L’affiche du « FestiFaï » édition 2009
– Un concert, puis deux, puis trois… entre Ferme du Faï et hangar agricole de particulier, entre écho de trompes et pièce pour piano à queue sur lit d’eau (mise en scène sur une idée de…l’orage !). Au printemps 2009, l’idée de fusionner le lieu au concept de la scène aquatique a fini par émerger et germer au grand air sur l’ancien étang de pisciculture de la Ferme du Faï
– L’expérience de la création musicalo-poétique à plusieurs : lors d’un « Renc’arts » en décembre 2009, une résidence artistique de deux jours au Café des Arts de Grenoble, Philippe Séranne rencontre Jean-Luc Schwartz et Jean-Philippe Seunevel. L’idée que l’échange de pratiques, mots et mélodies pourrait être productrice d’étincelles engendre alors la mise en œuvre au Faï de cette émulsion qui constitua la première édition 2009 « Trio pour nos montagnes enchantées »… La recherche acoustique autour des fabuleuses trompes du Faï est à l’origine de la marque de fabrique du FestiFaï : sa scène aquatique.
– une rencontre, puis deux, puis trois. Xavier Lacouture, Pierre Henri, des pianos-navigateurs à Marseille…
L’édition « 2010 »: un FestiFaï végétal
– Un lieu, puis deux, puis trois. Puis beaucoup. Les massifs Haut-Alpins, le site atypique de la Ferme du Faï, la remise en état du Café du Peuple qui revivifie la création artistique au sein de Veynes, et tous ces pays d’Europe et du monde qui s’y invitent pour quelque temps.
En bref : un festival né d’expériences musicales en des lieux atypiques. Le succès des rencontres effectuées, autant entre artistes qu’avec le public, y ont produit une dynamique d’envies et d’idées que l’on ne peut désormais plus stopper ! Et un projet collectif avant tout : c’est grâce à « la présence de gens motivés et enthousiasmés [tels que] le Café du Peuple et le Fourmidiable , les Villages des Jeunes (volontaires internationaux), les salariés français en réinsertion, les habitants, etc. », et à la rencontre de ces gens disponibles au même moment qu’une puissante « dynamique de création » se met en place.
L’année 2011 : brevetage d’une recette savoureuse
L’édition 2011: les pianos prennent l’air
Depuis l’année dernière, FestiFaï se présente sous sa forme la plus épanouie. Grâce au temps bien sûr, mais également à des subventions (parlons peu mais parlons bien : la culture, c’est comme la confiture, il faut du sucre pour la faire prendre) qui ont permis le développement de plusieurs désirs artistiques. Parmi eux : l’intensification de l’aspect collectif de la création, avec une implication plus forte et prolongée des volontaires mêlés à une résidence d’artistes. Egalement : le développement de la création plastique qui ne s’est vraiment greffée à la programmation qu’à partir de ladite année.
Depuis l’année dernière encore, le navire FestiFaï est un piano-pirate à trois mats qui ne pourrait fonctionner sans l’intégralité de son équipage : Philippe Séranne à la manœuvre de la barre, Xavier Lacouture rythmant les rameurs, Marie-Sophie Koulischer coordonnant ses matelots tisseurs de beautés à admirer, voiles faites de coquillages et algues hautes-alpines. Et l’équipage : musiciens, chanteurs, comédiens et plasticiens d’ici et d’ailleurs, volontaires internationaux et bénévoles d’ici, salariés en réinsertion, équipe du Fourmidiable…Du domaine de la création au domaine logistique ou de l’information-communication, amateurs et professionnels seront tous présents pour donner le meilleur de leurs saveurs.
Et depuis l’année dernière enfin, les pianos ne se satisfont plus de l’agréable remous de l’eau : ils prennent de la hauteur et grimpent aux platanes (quelque peu influencés par le grain de fantaisie de la compagnie « La Rumeur ») !
Retour vers le futur: l’édition 2012 et au-delà
échange des rôles pour 2012: piano à terre et public dans l’air!
2012 continue sur la même lancée que l’année passée…et voit même plus grand pour la suite (pas d’éléphants dans les platanes, non!). L’objectif est de faire bouger les atomes crochus de Veynes et ses alentours par une implantation vagabonde de l’art sous sa forme musicale, langagière et plastique: faire de la Ferme du Faï, un lieu de résidence artistique continu pour la création plastique est un des projets. « Excentrer » FestiFaï dans le temps et l’espace en est un autre (la machine à remonter le temps d’HG Wells n’est pas un de leurs secrets atouts, non encore!): ouvrez vos oreilles et surveillez les échos du festival qui devraient bientôt retentir dans les programmes de la Passerelle, scène nationale de Gap et autres lieux intimes et exceptionnels de la région.
Qui a donc dit que la mayonnaise allait tourner avec le temps?!